En février 2024, FranceAgriMer publiait une étude sur les contenants en polystyrène dans la filière aquatique[1] avec pour conclusion : « En raison de leurs performances isothermes indispensables, les caisses marée PSE sont intra-connectées à la structuration complexe de la filière aquatique française qui en est très fortement dépendante ». En effet, une approche par scoring sollicitée auprès des acteurs de la filière mentionnait les caisses marées PSE comme étant l’emballage l’idéal au regard des propriétés thermiques, mécaniques, ergonomiques, logistiques et des impacts sanitaires et environnementaux.
Ce dernier critère a justement été étudié par le cabinet de conseil RDC environment[2] grâce à une analyse comparative du cycle de vie (ACV) selon les méthodologies conformes aux normes ISO 14040/44 et méthode PEF. Une estimation des coûts environnementaux, calculée à l'aide du modèle de monétisation de l'étude conformément à la norme ISO 14008, a également été réalisée.
L'étude évalue plusieurs systèmes de caisses marée utilisées sur le segment des produits de la mer réfrigérés : formats à usage unique en polystyrène expansé (PSE), carton laminé et caisses plastiques rigides réemployables (PE simple et PP double paroi). Elle évalue chaque type d'emballage sur la base de paramètres environnementaux normalisés, en prenant en considération diverses étapes, de la production des résines au traitement de la fin de vie, en passant par les étapes logistiques ou de lavage le cas échéant.
Les résultats démontrent qu'aucun format ne domine pour toutes les distances et toutes les conditions.
Sur une distance de moins de 200 km, les performances de tous les systèmes sont globalement similaires. Cependant, au fur et à mesure que la distance de transport augmente, les différences deviennent plus prononcées. Entre 200 et 500 km, le PSE et les caisses réemployables ont un impact similaire sur le climat, tandis que le carton commence à montrer un impact négatif en raison de ses besoins plus importants en glace pour répondre aux exigences sanitaires européennes. Au-delà de 500 km, les caisses réemployables non isolées sont confrontées à une incapacité à maintenir la température requise et à des contraintes croissantes liées à la logistique de retour et au nettoyage des boîtes, en particulier si les flux de retour ne sont pas optimisés. Le carton laminé continue de perdre en compétitivité à mesure que les besoins en glace augmentent et que le gaspillage alimentaire devient plus probable.
À 900 km, le PSE devient l'option la moins coûteuse et la moins impactante selon l’étude de RDC environment. Au-delà de 1 250 km, le PSE est le seul format qui maintient de faibles coûts climatiques et environnementaux totaux dans toutes les hypothèses modélisées avec l'impact le plus faible sur 4 des 5 indicateurs examinés, sachant que la distance moyenne relevée par le MAC « Market Advisory Council » pour la distribution du poisson en Europe est de 2 350 km.
L'ACV ne modélise, ni n'évalue les impacts environnementaux ou logistiques de l'utilisation parallèle de plusieurs formats d'emballage (par exemple, des caisses réemployables pour les courtes distances et des caisses marées PSE pour les longues distances).
Les secteurs de la pêche et de l'aquaculture s'appuient depuis longtemps sur des solutions logistiques adaptées aux exigences sanitaires et opérationnelles de leurs activités. Ces secteurs restent largement dépendants du travail manuel et sont soumis à des exigences ergonomiques strictes. Tout changement dans l'organisation du travail ou sur les équipements doit donc être soigneusement évalué afin de déterminer son impact sur les conditions de travail.
La mise en place de plusieurs lignes liées à la nature de l'emballage entraînerait des contraintes supplémentaires en termes d'installations, de logistique et d'exploitation, telles qu'une augmentation de l'espace, de la consommation d'énergie et des infrastructures de manutention, qui ne sont pas prises en compte dans les limites du système de l'étude.
Ce sujet fait par ailleurs l’objet d’une étude interprofessionnelle menée par la France Filière Pêche mettant en évidence les implications techniques de l'introduction d'alternatives réemployables aux caisses marée en PSE. Leur poids accru (jusqu'à 15 % de plus lorsqu'elles sont remplies de glace et de poisson) complique les opérations de manutention. Les processus tels que la mise en glace, le cerclage ou l'emballage sont également affectés, chacun nécessitant des ajustements importants. Cela augmente la pression sur les ateliers déjà contraints en termes d'espace et contribue à la détérioration des conditions de travail des opérateurs.
Bien qu'il existe des solutions techniques permettant d'atténuer légèrement ces effets, elles impliquent des investissements importants, difficiles à quantifier compte tenu de la diversité des modèles économiques au sein du secteur. Les ajustements nécessaires impliquent l'acquisition de nouveaux équipements (machines d’emballage/déballage, système d’alimentation via ascenseurs etc…) qui, sans pouvoir éliminer totalement les impacts ergonomiques, auront une empreinte environnementale qui reste à quantifier.
Toute décision d'exploiter des lignes différenciées relèverait d'un choix commercial ou logistique des opérateurs individuels plutôt que d'une conclusion étayée par une modélisation du cycle de vie et l’impact des coûts.
En plus d’avoir un impact environnemental plus faible que les produits animaux terrestres, les produits de la mer, en particulier le poisson frais, disposent d’une grande qualité nutritionnelle. Riches en protéines, en acides gras oméga-3, en vitamines et en minéraux, ils jouent un rôle essentiel dans une alimentation saine et équilibrée. Toutefois, et contrairement à d'autres denrées périssables, les produits aquatiques frais sont très sensibles aux variations de température, ce qui rend indispensable une garantie de la chaîne du froid.
L'étude de RDC environment confirme que les caisses marées en PSE répondent à ces exigences en permettant un transport efficace, avec un coût environnemental et un risque de gaspillage alimentaire minimal. Par rapport aux alternatives réemployables ou cartonnées, le PSE offre de meilleures performances pour maintenir des températures stables et basses, préservant ainsi la qualité des aliments de la source à l'assiette. En tant qu'emballage à usage unique certifié pour le contact alimentaire, le PSE évite également les potentiels problèmes d'hygiène liés à la réutilisation, notamment les risques microbiens tels que la « Listeria monocytogenes ». Pour les espèces sensibles au risque histaminique (thon, maquereau), ces caisses permettent aussi de garantir le respect strict de la chaîne du froid. Préserver la qualité et la sécurité du poisson n'est pas seulement une question technique, il s'agit de protéger l'accès à l'une des sources de protéines les plus saines et les plus durables d'Europe.
Bien que l'étude ne formule pas de recommandations réglementaires, ses conclusions fournissent des preuves quantitatives que les performances environnementales des caisses à poisson dépendent du contexte. Des objectifs généraux en termes de réemploi ne permettront pas nécessairement de réduire l'impact environnemental total ; pour le transport à grande distance et en grandes quantités des produits de la mer, les caisses PSE affichent des performances constantes en termes de mesures climatiques, de modélisation de la circularité et de fiabilité fonctionnelle.
[1] « Étude sur les contenants en polystyrène dans la filière des produits aquatiques : Quelles solutions pour répondre aux futures exigences réglementaires ? » rapport et synthèse
[2] Etude disponible sur demande : eumeps.eu/get-in-touch
